FESTIVAL KOOM KOOM DE LA CALEBASSE

 

RAPPORT DU SYMPOSIUM

 

Ziguinchor, Hôtel Kadiandoumagne

les 13/12 2008 et 14 décembre 2008

 

 

 

 

Rapporteurs : Raphaël Ndiaye

                     Hamady Bocoum



Présidium : Modérateur, Pr. Djibril Tamsir Niane, historien ;

Rapporteurs : M. Raphaël Ndiaye, coordonnateur  de programmes à Enda Tiers Monde et M. Hamady Bocoum, Directeur du Patrimoine Culturel au ministère de la Culture.

 

Le symposium a été ouvert 15h40 par le Pr. Djibril Tamsir Niane, en présence M. Paul Dionne, Adjoint Administratif, représentant le gouverneur Léopold Wade.

Le modérateur exprime  ses remerciements à l’adresse des organisateurs du Festival et de Makhily Gassama qui lui a transmis l’invitation.

Il souligne la pertinence du choix du thème de la calebasse, si présente dans la pays et la sous région et sous tant de formes : récipient aux multiples usages, réceptacle d’aliments, symbole de la convivialité, conférant du goût aux aliments, au point que pour les gens de sa génération, certains  mets, tels que le Tô, ne sont bien appréciés que lorsqu’ils sont servis dans une calebasse.

Puis le modérateur annonce le programme du symposium : quatre communications seront présentées par les intervenants, l’une à la suite de l’autre. La parole sera donnée ensuite à la salle pour des contributions qui viendront en complément aux communications. Enfin un débat général sera ouvert au cours duquel des propositions sont attendues de la part des intervenants, pour ouvrir des perspectives de recherches et d’actions. En effet, un champ d’étude s’ouvre avec le présent symposium, a tenu à souligner le Modérateur.  Après cette introduction, il a donné la parole au représentant du gouverneur  de région, M. Paul Dionne.

M. le représentant du gouverneur adresse ses remerciements au GIE Goorgoorlu, initiateur du Festival, qui rehausse l’image de la région de Ziguinchor et qui démontre également qu’il est possible de créer des emplois, ce qui en indique toute l’importance. Il n’en veut pour preuve que l’exposition réalisée dans le cadre du Festival, dans les jardins de l’Alliance franco-sénégalaise, et dont les éléments peuvent conquérir tous les marchés, en particulier avec l’AGOA, tout en intéressant les touristes qui viennent visiter la région. Il s’agit-là d’une illustration de l’auto emploi dira t-il et il souhaite enfin que le Festival soit inscrit dans l’agenda des manifestations phares de la région.

Ce fut ensuite aux intervenants de présenter leurs communications. Le premier à le faire a  été M. Ahmadou Bouya Koutoudio qui a traité du thème : « La calebasse objet emblématique et culturel »

Synthèse de la communication du Dr. Ahmadou Bouya Koutoudio

Après avoir remercié le représentant du gouverneur, et l’assistance, il indique qu’il a abordé la calebasse sous une approche culturelle, en sa qualité de chercheur en tradition orale, et du fait que cet objet est emblématique des cultures africaines.
 
Il souligne la prise de conscience qui a été opérée de la mondialisation avant la lettre, en faisant  référence à Teillhard de Chardin, Senghor et  Camara Laye.

Il s’agit avec ce festival d’une belle initiative de M. Khalifa Dramé, qui a compris le besoin d’enracinement et d’ouverture, tel que Senghor l’a formulé. Il adresse un appel aux intellectuels africains pour la préservation de leur patrimoine culturel, démarche qui fonde de l’initiative de Khalifa Dramé. Cependant, il faut pour ce faire, des arguments solides, en sachant ce que nous perdons avec la calebasse, délaissée pour des objets modernes, et qui mérite d’être réhabilitée.

Au regard de la culture mandingue, la calebasse rappelle l’oeuf primordial ; comme chez les Dogon, où le Nommo se présente parfois sur la terre sous la forme de la calebasse.

Elle figure l’embryon humain détaché plus tard de la plante, comme l’enfant le sera de la mère, en coupant le cordon ombilical. Il y a une étroite analogie entre la calebasse et le jeune enfant, d’où la symbolique de sa présence dans les rituels du mariage et du baptême.

L’intervenant se réfère également à la culture sérère, où la calebasse, plante tentaculaire, symbolise la fécondité, en même temps qu’elle intervient dans les rites du baptême du nouveau-né, aux côté d’éléments tels que le sel, le coton, la cola et la plante appelée muc en sérère, qui connotent la protection de l’enfant contre la nomination. La cola est croquée par la bouche, et il n’existe pas de bouche qui n’ait jamais consommé le sel.

L’intervenant souligne aussi le symbolisme prophétique de la calebasse selon qu’elle est entière ou brisée : annonce de mariage dans le premier cas, de la famine, de a misère et de la mort si elle est brisée. C’est un objet culturel révélateur de notre ontologie, ce qui nous impose  l’impérieuse obligation de la réhabiliter.

Abordant ses propriétés en pharmacopée, selon les différentes parties de la plante, il cite Michel Arbonier  pour indiquer que ses propriétés sont laxatives, diurétiques et cicatrisantes, fébrifuges, et sont utilisées contre les morsures des serpents, etc.

Au plan artistique ; la calebasse sert de caisse de résonance à de très nombreux instruments de musique, de même qu’elle est adaptée au pinceau et à la décoration.

Au plan touristique, elle peut contribuer à l’accroissement du nombre de touristes, ce qui permettrait de relancer le tourisme et de vivre dignement pour ceux qui interviennent dans le secteur.

Avec la calebasse nous avons beaucoup de potentialités si nous sortons de notre aliénation, a conclu l’intervenant.

Synthèse de la communication du Pr. Alain Sissao chercheur au CNRST de Ouagadougou.

Pour sa part, le Pr. SISSAO a développé une approche culturelle de la calebasse chez différents peuples du Burkina Faso.

Plante africaine, elle est connue 6000 ans avant notre ère, alors qu’elle a été introduite en Europe après Christophe Colomb. Elle fait l’objet d’un usage constant chez les 60 ethnies du pays.

Après avoir indiqué la famille d’appartenance de la plante – les Cucurbitacées – il indique les types de sols sur lesquels elle pousse, les  zones et de périodes de culture.

Produit principalement féminin, la calebasse plantée par l’homme en pays moaga, se développe en surface mais aussi sur le toit des cases.

Chez les Turka, elle est donnée au mariage pour indiquer que l’épouse peut rejoindre son mari et c’est l’un des principaux récipients du lait.

Son usage pour la réception et le partage des mets est très important, pour le tô en particulier. Elle est symbole de l’accueil et de l’hospitalité.

Il en est fait usage dans les rituels religieux, les libations plus précisément, de même que pour les funérailles. Ainsi chez les Nionionsé, la tête du mort est rasée et recouverte d’une calebasse.

Sa présence est constante dans les instruments de musique, entre autres : le balafon, l’arc musical, le Bendré – tambour de messages - dont elle permet de reproduire les tons de la langue, avec la distinction d’un tambour mâle et d’un tambour femelle. A ce titre, la fabrication du bendre impose parfois l’isolement et l’abstinence sexuelle pour conférer même à l’instrument une efficacité contre les mauvais esprits.

Symbole du ventre fécond de la femme par sa rotondité, la calebasse rappelle la gestation, et se trouve présente dans le cycle de celle-ci.  Dans un conte de l’ethnie Gouin, la calebasse est assimilée à la femme qui avale tous les actants de son parcours, mais qui sera écrasée pour libérer les être avalés, ce qui renvoie à la délivrance de la parturiente. La calebasse se trouve toujours là où réside la femme et symbolise les savoirs humains. Un langage codé lui est quelquefois associé.

Sur le plan économique, les professionnels de la calebasse connaissent un affaiblissement de leurs gains à cause de la profusion d’objets de remplacement. Avec le Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou – SIAO -  il y’a une volonté de redéployer cet objet aux côtés d’autres et par le canal de l’artisanat, et cet effort doit être poursuivi et  prolongé.

Synthèse de la communication du Dr. Mamadou Sarr, environnementaliste à Enda Eddoc et professeur à la Fastef, UCAD.

L’intervenant  remercie les organisateurs et prévient qu’il ne reviendra pas sur certains aspects déjà développés par ses prédécesseurs, même s’ils sont présents dans sa communication.

Figurant parmi les premiers fruits domestiqués par l’homme, la calebasse a été identifiée dans des sites archéologiques et datée de 12 000 ans. Elle se développe dans les régions tropicales suivant des conditions physiques, (température, humidité, types de sols) définis par l’intervenant.

La calebasse est cultivée dans plusieurs pays d’Afrique et d’Amérique Latine et constitue de ce fait un enjeu pour la sous région Afrique de l’Ouest. D’où l’idée originale d’un Festival de la calebasse.

L’intervenant indique qu’il existe deux types de calebasses :

v  Lagenaria siceraria de la famille des Cucurbitacées. C’est une plante herbacée annuelle, rampante ou grimpante, avec plusieurs variétés. Elle possède des vrilles spiralées lui permettant de s’attacher à des supports. Sa croissance est relativement rapide, la  fleur généralement unisexuée.  Le fruit est protégé par une écorce dure.

v   Crescentia cujete : Calebassier, grand arbre de la famille des Bignoniacées.

S’agissant de la plante rampante, l’intervenant souligne l’extension de la famille des cucurbitacées, ce qui permet de placer aux côtés de la calebasse le concombre, la courge, le melon, le cornichon, autant de plantes dont les fruits sont comestibles. C’est pourquoi chez les Sérères, précisera t-il, pendant les premiers stades de son développement, la calebasse était écrasée et consommée sous forme de pâte.

Il aborde ensuite les propriétés de la calebasse, en s’appuyant sur la composition chimique qui en explique les propriétés médicinales et diététiques. Elle contient des antioxydants (bêta-carotène, lutéine et zéaxanthine) qui protègent contre les effets des radicaux libres. Ses molécules sont très réactives face aux maladies cardiovasculaires et certains cancers. En effet, anti-cancéreuses et anti-inflammatoires, les cucurbitacines, particulièrement la cucurbitacine B,  seraient actives dans la diminution de  la croissance des cellules cancéreuses.  Hypoglycémiant la calebasse favorise un meilleur contrôle du diabète, tout en étant riche en vitamines comme les autres cucurbitacées. En effet, on trouve en elle les vitamines B2, B5 B6, B9, C, K, mais aussi du fer, du cuivre, du manganèse.

Avec la calebasse, nous sommes en présence à la fois d’un écosystème et sociosystème, en interaction et en interrelation, souligne l’intervenant.

 - Au plan de l’écosystème, de la température plus précisément, la calebasse favorise la création d’un microclimat en luttant contre l’évaporation. Cependant une trop grande humidité lui est néfaste. Dans ce cas, il est recommandé de  déplacer le fruit pour le protéger, ce qui peut également contribuer, en le roulant, à en accentuer la rotondité. Par ailleurs, il est préférable d’intégrer la calebasse en polyculture pour la protéger, au lieu de la cultiver seule.

La calebasse connaît des ravageurs – comme la chrysomèle rayée -, contre lesquels la lutte biologique, chimique et physique est recommandée. La lutte biologique s’appuie sur des insectes qui mangent ses ravageurs (les fourmis, les carabes, les oiseaux), alors que les nématodes entomogènes permettent de contrôler la prolifération des larves.  Quant aux extraits de plantes, l’intervenant recommande de recourir à l’azadirachtine et la salannine qui sont toxiques pour la chrysomèle.

La lutte chimique reproduit parfois l’odeur d’insecticides répulsifs pour les ravageurs. Il en va de la sorte avec les kaïromones synthétiques qui imitent l’odeur de la cucurbitacine produite par les fleurs. Selon le même schéma, il est également procédé à une utilisation d’insecticides répulsifs.

Quant à la lutte physique, elle passe par la pose de grillages fins ou de tissus de fine maille à retirer lors de la pollinisation.

 En effet pour sa reproduction, la calebasse est sujette à une pollinisation par les abeilles grâce à leurs pattes. Les abeilles sont  attirées par l’odeur de la plante et en se posant d’une fleur à une autre, elles en transfèrent le pollen. La nature fait si bien les choses !

- Le sociosystème comprend toutes les facettes relatives à l’homme. On retiendra cet adage sérère : « La calebasse respire mais ne transpire pas », signifiant par là qu’elle s’adapte aux conditions de température ambiante pour une conservation durable de ses contenus. A ce titre, elle s’oppose aux récipients métalliques, dont le fer chauffe dès que la température ambiante monte, ce qui déprécie nombre de produits, les aliments plus particulièrement.

Par ailleurs, la calebasse est  biodégradable contrairement au plastique qui nécessite 200 ans avant de l’être, soit 8 générations.

Et l’intervenant de faire un certain nombre de propositions en matière de recherche-action, d’IEC, d’enseignement :

1. Intensification des recherches sur la calebasse par des organismes de recherche tels, IRD, ISE, Enda, le Codesria, ISRA ;

2. Mise en place d’une banque de gènes, qui répertorie toutes les variétés de calebasse – (120 genres et 800 espèces) ;

•         3. Développement d’un programme d’IEC et de promotion de l’usage de la calebasse en vue de réduire l’usage du plastique ;

•         4. Développement d’un marché sous régional de la calebasse (marché hebdomadaire sous régional du type de celui de Diaobé) ;

•         5. Développement de réseaux des métiers de la calebasse ;

•         6. Développement de modules d’enseignement dans les écoles d’agronomes autour la calebasse et d’autres produits locaux propres, avec une esquisse de programme qui pourrait comporter les éléments suivants :

1- les compétences et les objectifs généraux du programme ;

2- les objectifs spécifiques du programme ;

3- les démarches pédagogiques et didactiques ;

4- les cibles ;

5- Les thématiques ;

6- Les stratégies de mise en œuvre ;

7- L’élaboration d’un mécanisme de suivi et d’évaluation des actions et du programme dans sa globalité ;

8- Les stratégies de remédiation ;

9- L’élaboration d’un programme de recherche-action pour nourrir les programmes d’enseignement.

 Le Dr. Sarr a ensuite présenté à titre d’exemple un programme d’enseignement, avec comme cibles les élèves et les enseignants des écoles d’ingénieurs agronomes ; les agriculteurs ; les chaînes commerciales. Le programme de formation pourrait s’organiser autour des modules suivants :

•         Module 1 : La biologie de la calebasse :

•         Module 2 : L’environnement de la calebasse

•         Module 3 : Les représentations sociales de la calebasse

•         Module 4 : Les métiers de la calebasse

•         Module 5. La calebasse et l’économie

 L’intervenant propose également  une stratégie de mis en œuvre qui s’appuie sur :

-          La formation des maîtres ou des animateurs du programme ;

-          L’élaboration des supports (guide du maître et manuels de l’élève) et outils de communication.

 S’agissant de la stratégie IEC, il propose :

-          des émissions radio ou télé organisées et planifiées pour le grand public ;

-          des films, des affiches, des dépliants, des sketches, des calendriers, des jeux, des boîtes à images, etc.

 En guise de conclusion, il souligne les enjeux économiques, mais aussi de consolidation des entités ouest-africaines en devenir, telles que  la CEDEAO, UEMOA, OMVS. Puis, il invite a méditer cette pensée : « Simple et une, elle [la calebasse] sert les pauvres principalement les mendiants  comme sébiles pour demander l'aumône. Ornée et huilée elle devient vaisselle du roi ». Hassane Dao.

Omar Samb, Directeur de l’Agence Nationale pour la Promotion et le Développement de l’Artisanat. APDA.

 L’intervenant développe une approche artisanale et économique de la calebasse, en commençant par rappeler les fondements de la politique touristique et artisanale des autorités de l’Alternance. Il et salue les efforts de M. Khalifa Dramé Président du GIE Goorgoorlu et ambassadeur de l’artisanat du Sénégal.

 Il souligne la polyvalence de la calebasse dans nos sociétés, et ses meilleurs atouts dans la conservation des produits alimentaires. Il invite à la substituer aux emballages  en plastique.

L’intervenant met en exergue aussi les qualités de la calebasse au plan artisanal, avec les oeuvres somptueuses de décoration intérieure et extérieure, réalisées grâce à elle. Il indique la volonté des autorités d’arriver à une labellisation des produits réalisés à partir de la calebasse, en obéissent aux normes en matière d’exportation. Il souligne la possibilité de réaliser des dizaines de millions de Fcfa de chiffres d’affaires avec la calebasse. Il invite à une sensibilisation des autorités, notamment pour le mobilier réalisé à partir de la calebasse en indiquant que sa structure l’APDA l’est d’ores et déjà.

 Il remercie M. Khalifa Dramé  et souhaite que la sous région s’associe à la prochaine édition du Festival.

 Contributions de la salle

 Khalifa Dramé

M. Khalifa Dramé souligne qu’il travaille sur la calebasse depuis une vingtaine d’années, en tant qu’artiste disigner. Il a d’abord fait beaucoup d’expositions au plan international, plus précisément en Allemagne, dans le but de faire la promotion de ce matériau aux multiples facettes.

Cependant, se rendant compte que ce matériau intéressait beaucoup d’Européens, qui voulaient même en acquérir le concept, M. Dramé a décidé d’en assurer la promotion au niveau national, pour inviter les Africains, en particulier les Sénégalais, à travers  un Festival qui lui consacré, à se départir du plastique, non biodégradable, et qui détruit l’environnement.

Sur le plan économique, M. Dramé a noté que le Mali réalise annuellement plus de deux milliards de Fcfa de ventes de calebasses au Sénégal, ce qui prouve que ce produit pourrait  également constituer une source économique pour le pays.

 Dès lors et afin d’éviter que le prix de la calebasse soit discuté et fixé à Bruxelles, au Japon ou dans d’autres pays d’Europe, d’Amérique, etc., comme c’est le cas du coton et du cacao, M. Dramé pense que nous devons nous battre pour que ce produit africain reste en Afrique et soit une source de création d’emplois pour les jeunes sur le plan agricole, artisanal, etc.

 Noha Cissé, proviseur du lycée Djignabo de Ziguinchor

Il rend un  hommage appuyé à Djibril Tamsir Niane, initiateur, par la portée de ses écrits, d’une vocation d’historien qui s’est manifestée en lui. Il remercie également M. Khalifa Dramé

S’agissant de la calebasse, il rappelle le Mythe fondateur du Kankuran avec cette femme du nom de Sira qui avait voulu percer le mystère de ce qui se passe dans la retraite des initiés, suite à leur circoncision. Pour ce faire, elle tenait une calebasse, prétendument remplie d’un repas de riz destiné aux initiés. Or, surprise : le riz ne fume, ce dont ses interlocuteurs s’étonnent ! En fait, la calebasse contenait du coton pour la tenue des circoncis. Découverte et confondue, la femme est renvoyée et pour veiller désormais sur les initiés et leur retraite, le masque du Kankuran a été créé et institué. Ce mythe confirme que la calebasse respire mais ne transpire pas. Il confère également à la calebasse une dimension symbolique d’antidote aux pièges tendus par la société.

La calebasse est un instrument de mesure entre Peuls et Mandingues, avec généralement une calebassée de lait contre une calebassée de couscous ; Elle est la mesure des coépouses pour instaurer l’équilibre entre elles. C’est également un instrument d’union de la grande famille clanique, ainsi, lorsqu’on se retrouvait dans la demeure des hommes, chaque femme y amenait son mets dans sa calebasse et toutes les calebasses étaient alignées. Un décompte en était fait, rapproché au nombre des coépouses pour constater si l’une d’elles avait manqué d’apporter la sienne, ce dont les raisons lui étaient demandées.

En pays diola, la calebasse assure une fonction cultuelle, notamment pour exorciser le mal. Les femmes du bois sacré s’en servent à la place des claquettes de bois, pour accompagner les prières.

L’intervenant regrette de voir le plastique remplacer la calebasse, notamment avec les calebassettes usinées, ainsi que la faiblesse de la vulgarisation de la calebasse, et recommande de monter des expositions dans les lycées.

Hamady Bocoum, Directeur du Patrimoine Culturel au ministère de la Culture

Il souligne que la calebasse est une patrimoine total et annonce la création d’un musée régional à Ziguinchor par le Ministère de la Culture, dans le cadre de la mise en place de muées régionaux. La calebasse devra trouver la place qui lui sied dans ce musée, premier du genre.

Ousmane Sow Huchard

Il souligne l’excellence du choix porté sur Djibril Tamsir Niane pour conduire ce symposium

Il s’interroge également sur les raisons qui fondent le choix de la Casamance, et de Ziguinchor pour abriter le Festival.

Il salue l’excellente communication de Mamadou Sarr  et suggère de rajouter à ses propositions le thème : calebasse et organologie africaine.

Il mentionne l’existence du tambour à eau avec la calebasse renversée dans un récipient contenant de l’eau comme l’un de ses usages ; le projet d’une maison de la musique africaine à Ziguinchor qui devra réserver une bonne place à la calebasse, et demande de stabiliser et de fixer le Festival de la calebasse à Ziguinchor.

IL s’interroge sur la grande gourde de calebassier qui sert, entre autres, de tambour appelée en sérère  a tog et en usage exclusif dans cette entité ethnique : cette variété de grande dimension est-elle le produit d’une sélection des graines ? Quels contacts ont-ils déjà été pris avec l’ISRA ?

Enfin l’intervenant offre sa collaboration pour développer la dimension muséographique de la calebasse, en suggérant d’intéresser même l’Union africaine au Festival, de façon à lui conférer  un caractère panafricain et à faire de Ziguinchor un pôle culturel important.

Mohamed Seck, chef d’entreprise coordonnateur du Festival

L’intervenant confesse avoir fait une découverte étonnante : il n’existe pad de calebasse dans sa maison ! C’est dire, combien le Festival et le Symposium ont été pour lui des révélateurs. Il souligne l’importance du Symposium et la qualité des communications. Puis, il adresse à M. Sarr la question de savoir combien de temps est requis pour produire le fruit calebasse et si le calebassier est un arbre sauvage ou non ?

Ouverture des débats

M. Alpha Barry

Il observe que la calebasse est instrument banal en raison de sa forte présence dans nos cadres de vie, mais qu’en réalité elle nécessite des études sérieuses.

Il met en exergue différents usages traditionnels de la calebasse, suivi en cela par d’autres intervenants dont Madame Mahawa Doumbia, seule femme ayant pris la parole. Il donne quelques exemples d’usages de la calebasse : l’enfant qui n’arrive pas à marcher et auquel on attache des rondelles de calebasse aux pieds, ce qui lui permet d’acquérir cette capacité au bout d’une semaine ; l’usage fait de la calebasse contre les sorciers avec des rondelle à la ceinture et qui mettent l’enfant hors de danger ; le recours aux mêmes rondelles au cou de l’enfant en pays mandingue pour faire disparaître des boutons, etc.

Madame Mahawa Doumbia mentionne le recours à la calebasse pour l’exécution d’un langage codée permettant aux femmes de communiquer entre elles sur le rythme déterminé ; les propreté de la calebasse dans la cuisine et comme paratonnerre lorsqu’on la place sur la tête pendant  l’orage ; sa capacité à protéger ses habits de la pluie ; l’usage qu’en font les Mancagnes pendant un an après la disparition d’une personne, en la faisant porter sur la tête des enfants ; son rôle crucial dans les rites de fécondité et de sauvegarde du nouveau-né ; son efficacité lorsqu’elle est neuve dans la préparation de certaines médications ; son symbolisme en tant que lien de la famille en tant que plante rampante.

L’intervenante encourage M. Khalifa Dramé à poursuivre la recherche, notamment auprès du milieu féminin !

D’autres intervenants soulignent le savoir-faire africain dans le transport de la calebasse par un emboîtement qui tient compte de la taille des objets et qui permet de transporter des dizaines d’unités.

Nous notons également  les interventions de MM. Kéba Dabo Acteur des Journées culturelles de Sédhiou ; Ameth Diop qui invite à développer la culture de l’arbre dans le cadre de la ruralisation.

Adama Diouf pour sa part met l’accent sur la tonalité passéiste de l’approche de la calebasse. Il y’a une disparition de pans entiers de nos cultures du fait que nous subissons l’occidentalisation du monde. L’accent passéiste des interventions me perturbe dit-il. Et de formuler, à propos de la calebasse, des questions toute simple d’étudiants : quelle solidité, quelle intégration dans l’économie compétitive face au plastique, simple d’utilisation ? La calebasse sa casse facilement, une économie de la calebasse est-elle possible ? Faut-il substituer la culture de la calebasse à celle du mil ? Il faut être pragmatique et ne pas oublier les exigences du monde où nous vivons !

 Réponses  à Diouf et conclusions

Il a été répondu à M. Diouf que la calebasse s’inscrit dans une recherche d’alternatives, et non dans un passéisme rétrograde.  Nous sommes riches à mourir d’un patrimoine qui est l’un des plus diversifié au monde, avec la multitude de nos entités ethnoculturelles et ethnolinguistiques - 2000 avance t-on - au moment où la communauté internationale a reconnu et consacré la diversité culturelle. Nous devons nous inscrire dans cette recherche d’alternatives, notamment  à partir de la calebasse et en particulier sur le plan économique.

Il faut déboucher sur une stratégie pour la calebasse comme pour d’autres produits ; or nos produits sont imités, puis nous sont retournés et cela tue nos filières, avec un matraquage idéologique. Il est important de sortir du tourbillon et du matraquage idéologiques.

Il nous faut dégager une stratégie pour sauver la calebasse et qui nous permette de rendre celle-ci présente comme point de repère dans nos restaurants, et autres structures d’accueil, de sorte que celles-ci soient porteuses de nos cultures comme en Europe, par la fécondité créatrice de nos désigner, artisans, etc.

Passage du parrain

Parrain du Festival, M Abdoulaye Baldé, Secrétaire Général de la Présidence de la République du Sénégal  est venu saluer les participants du symposium, et procéder à la clôture de celui-ci.

Il a dit sa joie d’être présent au Symposium ; salué Djibril Tamsir Niane, historien de grande renommée, dont les ouvrages ont nourri ses lectures ; salué M. Noha Cissé, son ancien professeur d’histoire au lycée  Djignabo.

Il souligné l’importance de la calebasse dans nos cultures, en se réjouissant au passage de la présence du Pr. Alain SISSAO, venu du Burkina prendre part au symposium. Il a félicité Khalifa Dramé pour sa persévérance dans l’organisation du Festival, et sa volonté de maintenir la manifestation à Ziguinchor, tout en souhaitant son inscription dans l’agenda culturel de la région. Il a indiqué les nombreux produits qu’il est  possible de réaliser avec la calebasse.

 Passant la parole au ministre de la jeunesse et de l’Emploi des jeunes, celui-ci a dit toute son admiration pour le Pr. Djibril Tamsir Niane, historien de renom, et s’est félicité d’avoir participé au Symposium sur la calebasse.

La séance a été levée, ce samedi 13 décembre 2008 à 18h35.

Adoption du rapport et clôture du symposium

 Le symposium a repris ses travaux, le lendemain dimanche 14 décembre 2008, à partir de 12h30 pour la présentation du rapport de ses travaux. Après l’ouverture de la séance par le modérateur, les participants ont entendu le rapport lu par M. Raphaël Ndiaye, rapporteur principal. A l’issue de la présentation, le modérateur a ouvert la liste des intervenants. Tout en apportant à celui-ci des correctifs et certaines précisions, ces derniers ont salué la  fidélité du rapport et son caractère exhaustif, Le modérateur a demandé qu’il soit tenu compte des observations, remarques et suggestions des intervenants dans la rédaction finale du rapport.

 Synthèse du modérateur

Dans une synthèse qui inclut les dernières interventions et les travaux de la veille, le modérateur propose d’adresser au Président de la République une Recommandation  spéciale qui ramasse en quelques mots les principaux résultats du symposium et qui sont relatifs aux opportunités offertes par la calebasse : lutte contre la pauvreté, et pour l’emploi des jeunes ; la promotion de la femme ; la valorisation de notre culture sur le plan théorique et pratique, ainsi que l’alternative que représente la calebasse face au plastique. Il a cité le cas du Rwanda où par une décision des autorités du pays le plastique a été banni et remplacé par des produits naturels.

La recommandation au Chef de l’Etat doit inclure également :

-          les recherches à conduire et pour lesquelles des moyens doivent être dégagés ;

-          la nécessité de monter un dossier à partir du Symposium comme pièce à conviction et de constituer un petit comité auprès de Khalifa Dramé pour ce faire ;

-          le besoin d’une stratégie de recherche par un programme d’IEC, avec des émissions qui auront le don d’attirer l’attention du public ;

-          le montage d’un catalogue de l’exposition (photos des pièces exposées, et les notes explicatives) ;

-          le rassemblement des communications qui accompagneront le dossier de synthèse.

Puis s’étant félicité de l’esprit des travaux et des résultats du symposium, il a remercié tous les participants pour leur participation à la rencontre, la richesse de leur contribution, tout en formulant l’espoir que la rencontre soit suivie d’effets positifs et en grand nombre.

 C’est après ces propos qu’il a déclaré clos le symposium le symposium organisé dans le cadre du Festival Koom Komm de la calebasse, et qu’il a levé la séance à 14h30.